Malgré la crise sanitaire sans précédent que nous venons de traverser, le droit de la FPT n’a pas connu de répit. L’actualité statutaire a rarement été aussi riche. En effet, pas moins d’une vingtaine de décrets a été publiée depuis le début du confinement, la plupart attendus suite à la parution de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique. Ces textes touchent l’ensemble des domaines RH allant de la gestion du compte épargne temps aux positions administratives (disponibilité, congé parental…), de l’apprentissage aux mesures liées aux personnes handicapées ou au temps de travail (annualisation du temps partiel…) … ainsi qu’un thème particulièrement d’actualité, le télétravail.
Dans cet ensemble de textes, il nous est apparu important de faire un focus sur ce qui est pour la FPT une « révolution » : la rupture conventionnelle. Bien que les premiers décrets d’application soient parus en fin d’année 2019, trois textes supplémentaires ont été publiés depuis le confinement, parachevant ainsi le dispositif.
Depuis le 1er janvier 2020 la rupture conventionnelle s’applique donc dans la fonction publique (décret n°2019-1593 du 31 décembre 2019 relatif à la procédure de rupture conventionnelle dans la fonction publique). L’objectif de ce texte est de donner aux employeurs publics et à leurs agents les moyens de faciliter les réductions d’effectifs, débloquer des situations litigieuses et favoriser la mobilité entre le secteur public et privé.
La rupture conventionnelle a été rendue possible à titre expérimental pour les fonctionnaires durant une période de six ans, du 1er janvier 2020 au 31 décembre 2025. Elle est applicable pour les contractuels de la fonction publique en contrat à durée indéterminée (CDI), sans limite dans le temps, à partir de la même date. S’inspirant du dispositif prévu par le code du travail pour les salariés, elle en diffère toutefois assez nettement dans ses modalités. Selon le Gouvernement, « la rupture conventionnelle ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties ». Il faut un accord. Elle présente ainsi la particularité de ne pouvoir être conclue qu’après la tenue d’un ou plusieurs entretiens, dont le calendrier et le contenu sont fixés avec précision, compte tenu des conséquences lourdes d’un tel accord, à savoir la radiation de la fonction publique.
La rupture résulte d’une convention signée par les parties au contrat. Son contenu est détaillé avec précision et un modèle est proposé (arrêté du 6 février 2020 fixant les modèles de convention de rupture conventionnelle). Autre signe de l’importance de la décision, un délai de rétractation est prévu au profit des deux parties. Ce droit s’exerce dans un délai de 15 jours francs, qui commence à courir un jour franc après la date de la signature de la convention de rupture conventionnelle, sous la forme d’une lettre RAR ou remise en main propre contre signature. En raison de l’état d’urgence sanitaire, ce délai a été reporté jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire (cf. articles 1er I et 7 de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 et article 4 de la loi n°2020-290 du 23 mars 2020).
Une des conséquences de cette rupture est le versement d’une indemnité de rupture conventionnelle (décret n°2019-1596 du 31 décembre 2019). Cette indemnité est comprise entre des montants minimums variant selon l’ancienneté et un maximum de 1/12ème de la rémunération brute annuelle perçue par l’agent dans la limite de 24 ans.
La question se pose alors des critères permettant de fixer un montant entre ces deux bornes et la recherche d’équité entre les agents bénéficiant d’un même dispositif.
L’autre conséquence, moins bien appréhendée par les collectivités, est le versement des allocations chômage aux agents à leur charge. En effet, le régime d’assurance chômage des agents publics est étendu aux agents privé d’emploi à la suite d’une rupture conventionnelle. Les agents publics bénéficieront donc des mêmes droits aux allocations de chômage que les salariés relevant du code du travail.
Enfin, une particularité de la rupture conventionnelle dans la fonction publique consiste en l’obligation pour l’agent public de rembourser l’indemnité en cas de retour dans l’emploi public dans les six ans suivant sa rupture conventionnelle. Cette règle concerne les anciens agents publics réembauchés en tant qu’agent public pour occuper un emploi dans la collectivité territoriale avec laquelle il avait convenu d’une rupture conventionnelle, dans un établissement public en relevant ou auquel appartient cette collectivité territoriale : il est donc possible d’être recruté dans une autre collectivité territoriale sans reverser l’indemnité.
Avant leur recrutement dans la fonction publique, les candidats devront adresser à l’autorité de recrutement une attestation sur l’honneur précisant qu’ils n’ont pas bénéficié d’une indemnité de rupture conventionnelle, durant les six années précédant le recrutement, de la part de la même collectivité territoriale ou d’un établissement public en relevant, ou auquel appartient la collectivité territoriale.
Concrètement, la mise en place de ce dispositif s’avère délicat, exigeant de la part de l’autorité territoriale des qualités de « pilotage fin » des ressources humaines afin d’éviter plusieurs écueils :
L’avenir nous dira si ce dispositif rencontre le succès escompté…